Martin Luther King :

J'ai fait un rêve

(I have a dream)

 

"La non-violence est une arme puissante et juste, qui tranche sans blesser et ennoblit l'homme qui la manie. C'est une épée qui guérit."

Martin Luther King, Pasteur américain, Prix Nobel de la paix 1964. 

 

 

Sommaire :

1. Biographie de Martin Luther King

2. Version française de son discours "J'ai fait un rêve"

3. Version anglaise de son discours "I have a dream"

 

 

 

1. Biographie

Martin Luther King est né à Atlanta le 15 janvier 1929. Issu d'une famille bourgeoise, il bénéficie d'un environnement culturel favorable. Il devient pasteur baptiste à l'âge de 19 ans, dans la tradition de son père (pasteur à l'Eglise Baptiste d'Ebenezer à Atlanta) et de son grand-père. Il épouse Coretta Scott en 1953.

Le 1er décembre 1955, Rosa Parks, couturière, emprunte le bus qui doit la ramener chez elle. Le bus est plein et le nombre de rangs réservés aux Blancs ne suffit plus. Le chauffeur exige d'elle qu'elle se lève pour laisser un Blanc s'asseoir. Lasse de se soumettre, elle refuse de céder sa place ; elle est alors arrêtée. Militante, elle luttait pour les droits civiques et organisait des ateliers sur la coopération interraciale. E.D. Nixon, un leader de la communauté noire avec lequel elle avait collaboré, vient payer sa caution accompagné d'un avocat blanc sympathisant. Rosa Park devient le symbole de l'injuste politique menée (entre autres) par la compagnie de bus de Montgomery (Alabama).

Tandis que le boycott des bus de Montgomery s'organise, Rosa Parks est condamnée à payer une amende pour violation des lois de l'Etat d'Alabama. Afin de fédérer l'ensemble des initiatives, pasteurs et leaders noirs créent le 5 décembre la "Montgomery Improvement Association" (MIA) - Association pour le progrès de Montgomery.
Lorsque vient le moment d'en désigner le président, les rivaux de E.D. Nixon qui souhaitent lui barrer la route, proposent d'élire un jeune pasteur de Dexter Avenue, nommé à Montgomery depuis peu... Martin Luther King Jr. 

Martin Luther King ébauche sa doctrine de la non-violence : "Il arrive un moment où les gens sont fatigués. Nous sommes ici ce soir pour dire à ceux qui nous ont maltraité si longtemps que nous sommes fatigués - fatigués d'être ségrégués et humiliés (...). Nous n'avons pas d'autre alternative que la protestation. Pendant tant d'années, nous avons fait preuve d'une patience infinie. Nous avons quelquefois donné à nos frères blancs l'impression que nous appréciions la façon dont nous étions traités. Mais ce soir, nous sommes venus pour échapper à cette patience qui nous ferait accepter autre chose que la liberté et la justice". La salle, aux dires de Joe Azbell (journaliste au Montgomery Adviser), semblait avoir pris feu. Il régnait une atmosphère que personne ne pourrait jamais recréer. Le jour suivant il écrira que c'était le début d'une flamme qui traverserait toute l'Amérique. Le mouvement naissant des droits civiques trouve ainsi son porte-parole. 

Le révérend Jemison, de Baton Rouge, transmet à King les enseignements du boycott qu'il a lui même mené quelques mois auparavant. Les noirs s'organisent tant bien que mal ; malgré les efforts des "taxis noirs" et la mise en place d'un système de "car-pooling", nombreux sont ceux qui marchent à pied. Une vieille femme déclarera "mes pieds sont fatigués, mais mon âme est reposée". On retiendra la participation indirecte au boycott des femmes blanches qui ne voulant renoncer aux services de leurs domestiques, les faisaient conduire chez eux. La municipalité procède à des arrestations massives (Martin Luther King, Rosa Parks, des pasteurs...). L'effet aura été d'attirer l'attention de la presse nationale et internationale. C'est l'occasion pour King d'imposer son éloquence et sa culture. Il devient pour les journalistes, le porte-parole de l'Amérique noire. Le 4 juin 1956, la Cour fédérale de district condamne les règles ségrégationnistes en vigueur dans les autobus. Le maire de Montgomery fait alors appel à l'arbitrage de la Cour Suprême. Le 13 novembre, la Cour confirme le verdict : la ségrégation dans les autobus est déclarée inconstitutionnelle ! 

"Nous avions gagné le respect de nous-mêmes. Nous sentions que nous étions quelqu'un" (Jo Ann Robinson). La jubilation des "Negroes" était si forte que pour la première fois dans l'histoire du Sud, les figures d'épouvante en cagoules blanches du Ku Klux Klan qui quadrillèrent le soir même le quartier noir de Montgomery ne réussirent pas à les effrayer. Martin Luther King se préoccupe dès lors de former les gens à la non-violence. Nous ne devons en aucun cas répondre à la violence par la violence, une violence qui ne tarde pas à sévir de la part de la communauté blanche. 

A l'occasion du troisième anniversaire de l'arrêt Brown (En mai 1954, la Cour Suprême avait déclaré la ségrégation raciale dans les écoles publiques contraire à la Constitution), Martin Luther King critique vivement l'inaction du gouvernement en matière de droits civiques. Il assoit ainsi sa stature de leader national. 

Le 19 septembre 1958, il se fait poignarder par une déséquilibrée. Le coupe-papier atteint l'aorte. King échappe de peu à la mort. Il interprète cela comme un signe ; celui de partir en Inde pour accomplir le voyage qu'il envisageait depuis longtemps. Il avait découvert la philosophie de Gandhi au cours d'une conférence donnée par le Docteur Mordecai Johnson au séminaire de théologie Crozer. Aussi, au début de l'année suivante, il entreprend un voyage d'un mois, accompagné de son épouse. Il seront reçus par le premier ministre Nehru. Aux enseignements de Ghandhi, King associe ceux de Walter Rauschenbusch (1861-1918). Il s'agit d'appliquer les principes chrétiens aux problèmes sociaux et de se préoccuper des âmes aussi bien que des conditions économiques et sociales qui agissent sur elles. 

Vers 1960, Martin Luther King participe à l'essor du mouvement étudiant. Arrêté lors d'un sit-in, il est, à cause de ses antécédents, condamné à quatre mois de travaux forcés dans un pénitencier rural du Sud. Robert Kennedy qui s'inquiète du vote des Etats du Sud à l'élection présidentielle que mène son frère, obtient du juge l'annulation de la sanction. 

King rencontre le président en octobre 1961 mais celui-ci se préoccupait alors plus de la situation internationale ; le mur de Berlin s'était levé de terre quelques jours plus tôt. Il ne satisfait pas la demande d'une seconde Proclamation d'Emancipation..  

Les sit-ins, les "voyages de la liberté" et autres manifestations sont commentés, discutés et inspirent les étudiants de l'Université noire d'Albany State. Ils réclament des droits à leur tour. Cette "campagne d'Albany" menée dans l'Etat de Géorgie, sera une expérience négative pour Martin Luther King qui sort de ce conflit avec un sentiment d'échec. Il n'a pas pu avoir de rôle dans les discussions avec les autorités qui font tout pour qu'il ne passe ni pour un martyr ni pour un interlocuteur obligé. D'autre part il ne réussit pas à convaincre les étudiants de la nécessité d'adopter la non-violence.  

Quoiqu'il en soit, il reste le leader charismatique de la vague contestataire du début des années 60 ; le mouvement des droits civiques. Ses paroles ont galvanisé les Noirs et fait changer l'opinion des Blancs modérés.

Son principal mérite est d'avoir fait de la traditionnelle revendication des Noirs pour l'égalité, une idée ordinaire dans la conscience de l'Américain moyen. Il cherche à convaincre et non à humilier ses adversaires, lutter contre le mal et l'injustice et non contre les individus. Les menaces de mort qu'il reçoit à Montgomery lui inspirent d'abord de la crainte puis lui font admettre, irrémédiablement, la perspective d'une fin brutale prématurée. 

Maintenant que l'agitation a gagné tout le pays et que les Negroes descendent par milliers dans les rues, une question va se poser : du pacifisme de Martin Luther King ou de la résistance armée de Malcom X, laquelle de ces deux formes de lutte l'emportera ? Martin Luther King doit faire la preuve de l'efficacité de la non-violence ; il lance alors en 1963 la campagne de Birmingham (Alabama). Le Ku Klux Klan y régnait en maître et le chef de la police était un de leurs "sympathisants". La ville avait obtenu le surnom non usurpé de "Bombingahm" tant il était fréquent que soient plastiquées les résidences des contestataires. "Ségrégation maintenant, ségrégation demain, ségrégation pour toujours" : la ville de Birmingham était la ville la plus parfaitement ségrégée des Etats-Unis, elle est devenue le premier symbole d'intolérance raciste du pays. Aussi une victoire porterait un coup fatal à la ségrégation. Le projet C (C comme Confrontation), élaboré en janvier 1963, devait pousser l'oppresseur à commettre ses actes de violence au grand jour, devant la presse et les caméras, et amener ainsi le gouvernement à légiférer pour bannir la ségrégation de façon irrémédiable. La provocation devenait désormais un aspect crucial de sa stratégie non-violente. Contrairement à la campagne d'Albany, la campagne de Birmingham visait la déségrégation des seuls bars et grands magasins plutôt que de vastes ambitions confuses. Le boycott des bars doit suffire à faire plier les commerçants. Les autorités cèdent à la provocation de Martin Luther King ; il est incarcéré le 12 avril 1963 (un vendredi saint). Il rédige alors ce que l'on appelle la « Lettre de la prison de Birmingham », l'un des grands manifestes du Mouvement des droits civiques ; une vibrante défense de la philosophie et de l'action non-violente. Il répond à un groupe de pasteurs et de rabbins de Birmingham qui avaient condamné les manifestations orchestrées par les "agitateurs de l'extérieur". "Mes chers frères (...) l'histoire (nous apprend) que les groupes privilégiés renoncent rarement à leurs privilèges de leur plein gré (...). Depuis des années on me dit "attends !" (...), cet "attends !" presque toujours, signifiait "jamais!" (...). Vous vous inquiétez beaucoup de notre disposition à enfreindre les lois (...) ; je dirais comme Saint Augustin qu'une loi injuste n'est pas une loi du tout (...) une loi juste est une règle humaine qui s'accorde avec la loi morale ou la loi de Dieu. Une loi injuste rompt avec la loi morale  (...). J'ai été profondément déçu par les Blancs modérés (...), plus dévoués à l'ordre qu'à la justice, j'ai été gravement déçu par l'Eglise blanche (...). J'ai vainement espéré entendre des prêtres blancs dire "Obéissez à ce décret parce que l'intégration est moralement juste et parce que le "Negroe" est votre frère (...)". "Je ne crains pas l'issue de notre lutte à Birmingham et dans tout le pays, parce que le but de l'Amérique, c'est la liberté. Si maltraités et méprisés que nous soyons, notre destin est lié à celui de l'Amérique (...)". Encore une fois Robert Kennedy et J.F.K. interviennent en faveur de King pour le sortir de prison. 

Alors que le mouvement s'essouffle, James Bevel propose une stratégie tout à fait inédite ; enrôler les lycéens et les écoliers qui eux, n'ont pas le souci d'assurer les fins de mois. Le résultat dépasse toutes les espérances ; par vagues, les enfants submergent les forces de police. Les images des violentes répressions que subissent les enfants vont choquer l'Amérique ; il ne fallait pas toucher aux enfants ! Comment King pouvait-il se réjouir d'un tel stratagème ? Martin Luther King : "Introduire les enfants de Birmingham dans la campagne fut l'une de nos initiatives les plus sages (...). Beaucoup déploraient que nous nous servions de nos enfants de cette façon. Où étaient ces censeurs, nous demandions-nous,  pendant les siècles où le système ségrégué avait maltraité les enfants noirs ?".   

Le 11 juin 1963, J.F.K. prononce un discours télévisé inhabituellement grave. Il annonce une nouvelle législation sur les droits civiques, destinée à bannir la ségrégation dans tous les lieux publics. Ce projet est présenté une semaine plus tard au Congrès. L'été 63 fut, d'après Martin Luther King, une révolution parce qu'il changea la face de l'Amérique. 

Le 28 août 1963, c'est la Marche sur Washington ; Martin Luther King clôt la manifestation en prononçant le plus fameux de ses discours... "I have a dream..." (versions anglaises et françaises complètes ci-dessous), devant 250 000 personnes réunies au pied du Lincoln Memorial. Retransmis en direct par trois chaînes nationales, le discours de Martin Luther King apparaît être une apothéose. Mais deux semaines après une charge de dynamite ravage l'Eglise baptiste de la 16eme rue de Birmingham, tuant quatre fillettes noires. Anne Moody qui s'était déjà impatientée en entendant le discours de Martin Luther King (" nous avions des rêveurs et non des leaders") renonça définitivement à la non-violence après avoir entendu la nouvelle ; "Aussi longtemps que je vivrai, plus jamais je ne serai battue par un homme blanc. (...) Plus jamais. C'est fini. (...) La non-violence est finie". 

Le 22 novembre 1963 J.F.K. est abattu à Dallas. Martin Luther King, las et déprimé, prophétisa: "Voilà ce qui va m'arriver à moi aussi. Cette société est malade". 

Le 2 juillet 1964 Martin Luther King s'envole vers Washington pour assister à la signature par le Président Johnson de la loi sur les droits civiques (la Civil Rights Act). Cette législation bannissait la ségrégation dans tous les lieux publics, élargissait à nouveau les compétences du ministère de la Justice pour imposer des écoles intégrées, créait une commission d'égalité des chances dans l'emploi et un Service de relations communautaires chargé de régler les différends engendrés par la déségrégation. Mais la pleine citoyenneté n'existait pas sans le droit de vote et le pouvoir politique, et elle ne signifiait rien si une pauvreté endémique continuait d'accabler des générations de Noirs tenus à l'écart de la prospérité. L'insatisfaction des Noirs des grandes villes menaçait de plus en plus la paix sociale. Des émeutes éclatent pendant l'été 64. Le maire de New-York débordé par les émeutes à Harlem, s'en remet à Martin Luther King. La communauté noire New-yorkaise voit d'un très mauvais oeil ce "parachutage" dans leur ville. Mais loin de cautionner la politique du maire de New-York, Martin Luther King repart sans avoir réussi à convaincre celui-ci que la violence ne cessera qu'avec la naissance d'une justice économique. 

Le 14 octobre 1964, Martin Luther King est élu prix Nobel de la Paix. Il reçoit son prix à Oslo en décembre. Il est le plus jeune lauréat jamais désigné et le second Noir Américain (après Ralph Bunche). Peu ému par les titres honorifiques, Martin Luther King accueille toutefois ce prix comme la reconnaissance du Mouvement des droits civiques par la communauté internationale. Il accepte le prix Nobel au nom de tous les militants : "J'accepte le Prix Nobel de la Paix au moment même où 22 millions de Noirs américains sont engagés dans une bataille créatrice pour mettre fin à la longue nuit de la ségrégation. (...) Cette récompense que je reçois au nom du Mouvement signifie profondément que la non-violence apporte la réponse à la question politique et morale cruciale de notre temps, la nécessité pour l'homme de vaincre l'oppression et la violence sans avoir recours à la violence et à l'oppression. (...) J'accepte ce prix aujourd'hui avec une foi inébranlable dans l'Amérique et (...) dans l'avenir de l'humanité...". 

Tous ces honneurs mettent J. Edgar Hoover (le chef du FBI) hors de lui : "nous devons le marquer pas à pas (...) comme le Noir le plus dangereux pour l'avenir de ce pays du point de vue du communisme, des Noirs, et de la sécurité nationale". Il le dénigre, faisant bien savoir à ses subordonnés que "King ne vaut rien",  que c'est "le menteur le plus notoire du pays". Il va jusqu'à informer la femme de Martin Luther King des infidélités de son mari pour le déshonorer et l'acculer au suicide.

Mais pour de nombreux Blancs modérés, Martin Luther King apparaissait comme un moindre mal, lorsque l'on considère que les autres interlocuteurs possibles auraient été par exemple Malcom X. 

A Selma, Martin Luther King se retrouve en prison pour sa lutte pour la reconnaissance du droit de vote. "Il y a plus de Noirs avec moi en prison que sur les listes électorales...". Pendant son séjour en prison, Malcom X passe dans la ville et prononce un discours à Brown Chapel ; "Les gens feraient mieux de (...) donner (à King) ce qu'il demande, et de le lui donner vite, avant que d'autres groupes ne se présentent et n'essayent d'y parvenir d'une autre façon. Ce qu'il demande est juste, c'est le bulletin de vote (...) et ce sera obtenu, d'une manière ou d'une autre". Malcom X confie à Coretta King qu'il n'est pas venu pour compliquer la tâche de son mari mais pour présenter aux Blancs l'alternative qui s'offrent à eux : "Peut-être seront-ils plus disposés à écouter Dr King". Madame King se souvient d'avoir été impressionnée par l'évidente sincérité de Malcom X, mais n'eut guère le temps de l'apprécier : le 21 février 1965 Malcom X est abattu à Harlem de seize balles tirées à bout portant. 

Après de nombreuses marches, de nombreux morts (notamment à l'occasion des émeutes de Watts, quartier de Los Angeles), le 6 août 1965, le président Johnson signe le "Voting Rights Act" (loi autorisant la déségrégation des lieux publics et protégeant le droit des Noirs à voter). Aussitôt les politiciens locaux entreprirent de courtiser ce nouvel électorat. Elle instaure l'égalité de tous à l'embauche. Malgré cela, l'unité du Mouvement des droits civiques ne fait plus guère illusion. Partout on regrette ces parachutages du leader charismatique, suivis de près par la presse et les forces gouvernementales. Lorsqu'il quittait une ville, il restait l'impression d'un "cirque qui aurait plié bagage". 

La SCLC (Southern Christian Leadership Conference - association de pasteurs du Sud à Atlanta (Géorgie) dont Martin Luther King est le président) annonce qu'elle étend son action aux Etats du Nord ; il s'agit de passer de la lutte pour la justice légale, à la lutte pour la justice économique. Martin Luther King se rendra donc à Chicago ("Black Metropolis"), capitale officieuse de l'Amérique noire. Mais le Mouvement du Dr. King se fait supplanter par le Black Power. Les plus radicaux de ce mouvement font sensation dans les médias. Mohammed Ali incarnait à merveille toutes les revendications du Black Power : l'affirmation de la beauté et de la virilité noires, la fierté des origines africaines, le rejet libérateur de la haine de soi, inculquée par des siècles de servitude et par les critères esthétiques et culturels de l'Amérique blanche. " Black is beautiful !" devint le mot d'ordre. 

A Chicago, Jesse Jackson, qui avait rejoint la SCLC depuis la campagne de Selma, fut chargé de coordonner l'opération à Chicago. Il s'agit de mener la guerre contre les taudis. Martin Luther King loue un appartement dans le quartier de Lawndale, au coeur du ghetto. La désobéissance civile (grève des loyers...) ne pouvait s'appliquer dans le Nord où la loi était la même pour tous. A l'occasion d'une marche dans le quartier blanc de Gage Park, Martin Luther King est blessé à la tête par une pierre lancée par la foule qui scandait "Nous voulons King !". Trois jours après, le 8 août 1966, Jesse Jackson annonce qu'il marchera à travers Cicero (quartier symbole du racisme pur et dur depuis que l'arrivée d'une seule famille noire en 1951 avait déclenché une véritable émeute : 15.000 Noirs travaillaient à Cicero, mais aucun n'y habitait). Martin Luther King qui n'avait pas été consulté reprend néanmoins à son compte l'initiative de Jackson. Mais la signature d'un accord sur l'attribution égalitaire des logements le fit renoncer à cette marche. Cela constituait pour lui une première étape. Cette décision divisa profondément le Mouvement ; cet accord dépendait de la seule bonne foi des signataires, cela n'était en rien un résultat concret. Une partie du Mouvement marchera donc tout de même à Cicero mais cela passera inaperçu. 

Déçu, fatigué, trahis, menacé, Martin Luther King a maintenant 38 ans. Il commence à radicaliser ses positions. Il analyse dès lors l'avenir du Mouvement noir plus en terme de rapports de force qu'en un appel à la bonne volonté de ses adversaires ; "l'intégration véritable signifie le partage du pouvoir."  

En avril 67 Martin Luther King prend fermement position contre la guerre du Vietnam. "La guerre est l'ennemi des pauvres"; les dépenses engagées au Vietnam réduisent d'autant les programmes contre la pauvreté. Comment pouvait-il prêcher la non-violence aux révoltés des ghettos, s'il ne condamnait pas "Le plus grand responsable de la violence dans le monde d'aujourd'hui" : son propre gouvernement ? Cette prise de position provoqua au sein de la SCLC, des divisions d'une importance qu'il n'avait pas mesuré. Certains le désapprouvent publiquement. Le FBI renforce son obsession d'un téléguidage de Martin Luther King par les communistes.  

Le 18 mars 1968, Martin Luther King parle devant 18.000 personnes. Dix jours plus tard, il défile à la tête de grévistes. La manifestation dégénère, se terminant par la mort d'un jeune Noir de seize ans. Il faut ajouter 60 blessés et des dégâts matériels. Un couvre feu est décrété et 3.500 gardes nationaux réquisitionnés. Il décide de revenir à Memphis, comptant prouver qu'il peut encore organiser une manifestation non-violente.  

Le matin du 3 avril 1968, Martin Luther King s'installe au Motel "La Lorraine" (Memphis). Après s'être rendu à l'Eglise du Centennaire et réuni l'après-midi avec son entourage et les représentants de la communauté noire, grave et las, il prononce le soir devant 20.000 personnes, un discours poignant qui résonne d'une façon prémonitoire : "Et me voici maintenant à Memphis. Et certains commencent à dire qu'il y a des menaces (...). Je ne sais pas ce qu'il va arriver maintenant. Nous avons devant nous des jours difficiles. Mais cela m'est égal. Car je suis allé au sommet de la montagne (...) ; j'aimerais vivre une longue vie (...). Mais cela ne me préoccupe plus. Je veux seulement accomplir la volonté de Dieu. Et il m'a permis d'aller au sommet de la montagne. (...). Et j'ai vu la Terre promise. Je n'y parviendrai peut-être pas avec vous. Mais je veux que vous sachiez ce soir que notre peuple rejoindra la Terre promise". Il conclut en disant " Et je suis heureux ce soir. Je ne m'inquiète de rien. Je n'ai peur de personne. Mes yeux ont contemplé la gloire de Dieu !".  

Le jour suivant, le 4 avril 1968, Martin Luther King participe à une nouvelle réunion dans l'après-midi. De retour dans sa chambre à 17 heures, afin d'honorer l'invitation à dîner du pasteur Kyles, il se rase et passe des vêtements propres. Il sort ensuite sur le balcon qui surplombe le parking du motel. A 18 h 01, un coup de feu claque. La balle lui fracasse la mâchoire avant de lui briser la colonne vertébrale. Il sera immédiatement transporté à l'hôpital Saint-Joseph, mais y meurt à 19 h 05. 

Il repose sous une dalle où fut gravé le verset final d'un de ses cantiques favoris qui avait conclu son discours "I have a dream..." : "Enfin libre, enfin libre, merci Dieu tout- puissant, je suis enfin libre!"

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2. Discours "J'ai fait un rêve

Il y a cent ans, un grand américain qui jette sur nous aujourd'hui son ombre symbolique, a signé la Proclamation d’Emancipation. Cet arrêté d'une importance capitale venait porter la lumière, comme un phare d'espoir, aux millions d'esclaves noirs marqués par les flammes d'une injustice foudroyante, et annonçait l’aube joyeuse qui allait mettre fin à la longue nuit de la captivité.

Mais un siècle plus tard, nous devons faire le constat tragique que les Noirs ne sont pas encore libres. Un siècle plus tard, la vie des Noirs reste entravée par la ségrégation et enchaînée par la discrimination. Un siècle plus tard, les Noirs représentent un îlot de pauvreté au milieu d'un vaste océan de prospérité matérielle. Un siècle plus tard, les Noirs languissent toujours dans les marges de la société américaine et restent des exilés sur leur propre terre. Alors nous venons ici aujourd'hui pour montrer dans quelle condition épouvantable nous nous trouvons.

Nous venons dans la capitale de notre nation pour demander, en quelque sorte, le paiement d'un chèque. Quand les architectes de notre République écrivirent les textes magnifiques de la Constitution et de la Déclaration d'Indépendance, ils signèrent un billet à l'ordre de chaque américain. C'était la promesse que chacun serait assuré de son droit inaliénable à la vie, à la liberté et à la poursuite du bonheur.

Il est aujourd'hui évident que l'Amérique a manqué à cet engagement quant à ses citoyens de couleur. Au lieu de faire honneur à cette obligation sacrée, l'Amérique a remis au peuple noir un chèque qui revient marqué sans provision. Mais nous ne pouvons croire que la banque de la Justice a fait faillite. Nous ne pouvons croire qu'il n'y a pas assez de provision dans les grands coffres des perspectives nationales. Alors nous venons exiger le paiement de ce chèque, le paiement sur demande des richesses de la liberté et de la sécurité que procure la justice. Nous venons également dans cet endroit sacré pour rappeler à l'Amérique l’urgence absolue du moment. Ce n'est pas le moment de prendre le luxe de laisser se calmer les esprits, ni de nous endormir par une approche progressive. Il est temps de quitter la vallée sombre et désolée de la ségrégation pour prendre le chemin ensoleillé de la justice raciale. Il est temps d'ouvrir les portes de l’égalité des chances à tous les enfants de Dieu. Il est temps de tirer notre nation des sables mouvants de l’injustice raciale jusqu'au rocher solide de la fraternité.

Il serait fatal à la nation de ne pas tenir compte de l'urgence du moment, de sous-estimer la détermination des Noirs. Cet été étouffant du mécontentement légitime des Noirs ne prendra fin qu'à l'arrivée d'un automne vivifiant qui amènera liberté et égalité. L'année 1963 n'est pas une fin, mais un début. Ceux qui veulent croire que les Noirs se contenteront de s'exprimer avec force auront un fâcheux réveil, si la nation revient à ses affaires courantes comme s’il ne s’était rien passé. L'Amérique ne connaîtra ni repos, ni tranquillité, tant que les Noirs ne jouiront pas pleinement de leurs droits civiques. Les orages de la révolte continueront à secouer les fondations de notre pays jusqu'au jour où la lumière de la justice arrivera.

Mais il y a quelque chose que je dois dire à mon peuple qui est sur le point de franchir le seuil de la justice. En luttant pour prendre notre juste place, nous ne devrons pas nous rendre coupables d'actes injustes. Ne buvons pas de la coupe de l'amertume et de la haine pour assouvir notre soif.

Nous devons toujours conduire notre lutte dans un haut souci de dignité et de discipline.

Nous ne pouvons pas laisser notre protestation créative dégénérer en violence physique. Encore et encore, nous devons atteindre ce niveau exalté où, à la force physique, nous opposons la force de l'âme. Le militantisme merveilleux qui a investi la communauté noire ne doit pas nous amener à nous méfier de tous les blancs, puisque beaucoup de nos frères blancs, on le voit par leur présence ici aujourd'hui, se sont rendus compte que leur destin est lié au nôtre, et que leur liberté dépend étroitement de la nôtre. Nous ne pouvons pas marcher seuls.

Et quand nous marchons, nous devons jurer d'aller toujours de l’avant. Nous ne pouvons pas faire demi-tour. Il y en a qui demandent aux fervents des droits civiques "Quand serez-vous satisfaits ?". Nous ne saurons être satisfaits tant que nous ne pourrons pas laisser nos corps fatigués se reposer dans les motels des routes ou dans les hôtels des villes. Nous ne saurons être satisfaits tant que les Noirs ne pourront déménager que d'un petit ghetto à un ghetto plus grand. Nous ne saurons être satisfaits tant qu'un Noir du Mississippi n'aura pas le droit de voter, et qu’un noir à New York pensera qu’il n’y a rien qu’il puisse voter. Non, non, nous ne sommes pas satisfaits, et nous ne serons satisfaits que le jour où la justice et la droiture couleront comme les eaux d’un fleuve puissant que rien ne peut arrêter.

Je ne suis pas sans savoir que certains d'entre vous arrivent ici après maintes épreuves et tribulations. Certains d'entre vous viennent directement des cellules étroites de la prison. Certains d'entre vous viennent de régions où votre quête de la liberté vous a laissés meurtris par les orages de la persécution et renversés par le vent de la brutalité policière. Vous êtes les vétérans de la souffrance créative. Persévérez dans l'assurance que la souffrance non méritée vous portera rédemption.

Retournez au Mississippi, retournez en Alabama, retournez en Géorgie, retournez en Louisiane, retournez dans les ghettos et quartiers pauvres de nos villes du Nord, en sachant que cette situation, d'une manière ou d'une autre, peut être et sera changée. Ne nous complaisons pas dans la vallée du désespoir.

Je vous dis aujourd'hui, mes amis, que malgré les difficultés et les frustrations du moment, j'ai quand même fait un rêve. C’est un rêve profondément enraciné dans le rêve américain.

J'ai fait un rêve qu'un jour, cette nation se lèvera et vivra la vraie signification de sa croyance : "Nous tenons cette vérité comme allant de soi, que les hommes naissent égaux".

J'ai fait un rêve qu'un jour, sur les collines de terre rouge de la Géorgie, les fils des anciens esclaves et les fils des anciens propriétaires d'esclaves pourront s'asseoir ensemble à la table de la fraternité.

J'ai fait un rêve qu'un jour, même l'état du Mississippi, un désert étouffant d'injustice et d'oppression, sera transformé en un oasis de liberté et de justice.

J'ai fait un rêve que mes quatre enfants habiteront un jour une nation où ils seront jugés non pas sur la couleur de leur peau, mais sur leur caractère.

J'ai fait un rêve aujourd'hui.

J'ai fait un rêve qu'un jour, l'état d'Alabama, dont le gouverneur actuel parle d'interposition et de nullification, sera transformé en un endroit où des petits enfants noirs pourront prendre la main des petits enfants blancs et marcher ensemble comme frères et soeurs.

J'ai fait un rêve aujourd'hui.

J'ai fait un rêve qu'un jour chaque vallée sera élevée, chaque colline et montagne sera nivelée, les endroits rugueux seront lissés et les endroits tortueux seront rectifiés, et la gloire du Seigneur sera révélée et tous les hommes la verront ensemble.

Ceci est notre espoir. C'est avec cet espoir que je rentre au Sud. Avec cette foi, nous pourrons transformer les discordances de notre nation en une belle symphonie de fraternité. Avec cette fois, nous pourrons travailler ensemble, prier ensemble, lutter ensemble, être emprisonnés ensemble, nous révolter pour la liberté ensemble, en sachant qu'un jour nous serons libres.

Quand ce jour arrivera, tous les enfants de Dieu pourront chanter, en lui donnant un sens nouveau, cette chanson patriotique "mon pays, douce patrie de la liberté, c'est toi que je chante. Terre où reposent mes aïeux, terre aimée des pèlerins, de chaque montagne, que la liberté retentisse".

Et si l'Amérique veut être une grande nation, ceci doit se faire. Alors, que la liberté retentisse des grandes collines du New Hampshire. Que la liberté retentisse des montagnes puissantes de l'état de New-York. Que la liberté retentisse des sommets des Alleghenies de la Pennsylvanie !

Que la liberté retentisse des Rocheuses enneigées du Colorado !

Que la liberté retentisse des beaux sommets de la Californie !

Mais plus encore, que la liberté retentisse des Stone Mountains de la Géorgie !

Que la liberté retentisse des Lookout Mountains du Tennessee !

Que la liberté retentisse de chaque colline et de chaque taupinière du Mississippi !

Que la liberté retentisse !

Quand nous laisserons retentir la liberté, quand nous la laisserons retentir de chaque village et de chaque lieu-dit, de chaque état et de chaque ville, nous ferons approcher ce jour où tous les enfants de Dieu, noirs et blancs, juifs et gentils, catholiques et protestants, pourront se prendre par la main et chanter les paroles du vieux spiritual noir : "Enfin libres ! Enfin libres ! Dieu tout-puissant, merci, nous sommes enfin libres !"

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3. Discours "I have a dream" (Version Anglaise)

Five score years ago, a great American, in whose symbolic shadow we stand signed the Emancipation Proclamation. This momentous decree came as a great beacon light of hope to millions of Negro slaves who had been seared in the flames of withering injustice. It came as a joyous daybreak to end the long night of captivity.

But one hundred years later, we must face the tragic fact hat the Negro is still not free. One hundred years later, the life of the Negro is still sadly crippled by the manacles of segregation and the chains of discrimination. One hundred years later, the Negro lives on a lonely island of poverty in the midst of a vast ocean of material prosperity. One hundred years later, the Negro is still languishing in the corners of American society and finds himself an exile in his own land. So we have come here today to dramatize an appalling condition.

In a sense we have come to our nation’s capital to cash a check. When the architects of our republic wrote the magnificent words of the Constitution and the declaration of Independence, they were signing a promissory note to which every American was to fall heir. This note was a promise that all men would be guaranteed the inalienable rights of life, liberty, and the pursuit of happiness.

It is obvious today that America has defaulted on this promissory note insofar as her citizens of color are concerned. Instead of honouring this sacred obligation, America has given the Negro people a bad check which has come back marked “insufficient funds.” But we refuse to believe that the bank of justice is bankrupt. We refuse to believe that there are insufficient funds in the great vaults of opportunity of this nation. So we have come to cash this check – a check that will give us upon demand the riches of freedom and the security of justice. We have also come to this  hallowed spot to remind America of the fierce urgency of now. This is no time to engage in the luxury of cooling off or to take the tranquilizing drug of gradualism. Now is the time to rise from the dark and desolate valley of segregation to the sunlit path of racial justice. Now is the time to open the doors of opportunity to all of God’s children. Now is the time to lift our nation from the quicksands of racial injustice to the solid rock of brotherhood.

It would be fatal for the nation to overlook the urgency of the moment and to underestimate the determination of the Negro. This sweltering summer of the Negro’s legitimate discontent will not pass until there is an invigorating autumn of freedom and equality. Nineteen sixty-three is not an end, but a beginning. Those who hope that the Negro needed to blow off steam and will now be content will have a rude awakening if the nation returns to business as usual. There will be neither rest nor tranquillity in America until the Negro is granted his citizenship rights. The whirlwinds of revolt will continue to shake the foundations of our nation until the bright day of justice emerges.

But there is something that I must say to my people who stand on the warm threshold which leads into the palace of justice. In the process of gaining our rightful place we must not be guilty of wrongful deeds. Let us not seek to satisfy our thirst for freedom by drinking from the cup of bitterness and hatred.

We must forever conduct our struggle on the high plane of dignity and discipline. We must allow our creative protest to degenerate into physical violence. Again and again we must rise to the majestic heights of meeting physical force with soul force. The marvellous new militancy which has engulfed the Negro community must not lead us to distrust of all white people, for many of our white brothers, as evidenced by their presence here today, have come to realize that their destiny is tied up with our destiny and their freedom is inextricably bound to our freedom. We cannot walk alone.

And as we walk, we must make the pledge that we shall march ahead. We cannot turn back. There are those who are asking the devotees of civil rights, “When will you be satisfied?” we can never be satisfied as long as our bodies, heavy with the fatigue of travel, cannot gain lodging in the motels of the highways and the hotels of the cities. We cannot be satisfied as long as the Negro’s basic mobility is from a smaller ghetto to a larger one. We can never be satisfied as long as a Negro in Mississippi cannot vote and a Negro in New York believes he has nothing for which to vote. No, no, we are not satisfied, and we will not be satisfied until justice rolls down like waters and righteousness like a mighty stream.

I am not unmindful that some of you have come here out of great trials and tribulations. Some of you have come fresh from narrow cells. Some of you have come from areas where your quest for freedom left you battered by the storms of persecution and staggered by the winds of police brutality. You have been the veterans of creative suffering. Continue to  work with the faith that unearned suffering is redemptive.

Go back to Mississippi, go back to Alabama, go back to Georgia, go back to Louisiana, go back to the slums and ghettos of our northern cities, knowing that somehow this situation can and will be changed. Let s not wallow in the valley of despair.

I say to you today, my friends, that in spite of the difficulties and frustrations of the moment, I still have a dream. It is a dream deeply rooted in the American dream.

I have a dream that one day this nation will rise up and live out the true meaning of its creed: “we hold these truths to be self-evident: that all men are created equal.”

I have a dream that one day on the red hills of Georgia the sons of former slaves and the sons of former slaveowners will be able to sit down together at a table of brotherhood.

I have a dream that one day even the state of Mississippi, a desert state, sweltering with the heat of injustice and oppression, will be transformed into an oasis of freedom and justice.

I have a dream that my four children will one day live in a nation where they will not be judged by the color of their skin but by the content of their character.

I have a dream today.

I have a dream that one day the state of Alabama, whose governor’s lips are presently dripping with the words of interposition and nullification, will be transformed into a situation where little black boys and black girls will be able to join hands with little white boys and white girls and walk together as sisters and brothers.

I have a dream today.

I have a dream that one day every valley shall be exalted, every hill and mountain shall be made low, the rough places will be made plain, and the crooked places will be made straight, and the glory of the Lord shall be revealed, and all flesh shall see it together.

This is our hope. This is the faith with which I return to the South. With this faith we will be able to hew out of the mountain of despair a stone of hope. With this faith we will be able to transform the jangling discords of our nation into a beautiful symphony of brotherhood. With this faith we will be able to work together, to pray together, to struggle together, to go to jail together, to stand up for freedom together, knowing that we will be free one day.

This will be the day when all of God’s children will be able to sing with a new meaning, “My country, ‘tis of thee, sweet land of liberty, of thee I sing. Land where my fathers died, land of the pilgrim’s pride, from every mountainside, let freedom ring.”

And if America is to be a great nation this must become true. So let freedom ring from the prodigious hilltops of New Hampshire. Let freedom ring from the mighty mountains of New York. Let freedom ring from the heightening Alleghenies of Pennsylvania!

Let freedom ring from the snowcapped Rockies of Colorado!

Let freedom ring from the curvaceous peaks of California!

But not only that; let freedom ring from Stone Mountain of Georgia!

Let freedom ring from Lookout Mountain of Tennessee!

Let freedom ring from every hill and ever molehill of Mississippi. From every mountainside, let freedom ring.

When we let freedom ring, when we let it ring from every village and every hamlet, from every state and every city, we will be able to speed up that day when all of God’s children, black men and white men, Jews and Gentiles, Protestants and Catholics, will be able to join hands and sing in the words of the old Negro spiritual, “Free at last! Free at last! Thank God Almighty, we are free at last!”  

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